par Sébastien GOULARD
Les 29 et 30 septembre 2025, s’est tenue à Riyad, Arabie Saoudite, la Conférence sur les Investissements Culturels qui a réuni plus de 100 intervenants et 1500 participants. Cette première édition a confirmé les nouveaux objectifs artistiques et culturels de l’Arabie Saoudite.
L’Arabie Saoudite, de pétromonarchie à puissance globale
Sous l’impulsion du Prince héritier Mohammed ben Salmane, l’Arabie Saoudite connait une rapide transformation guidée par la stratégie Vision 2030 qui vise à moderniser et diversifier son économie, et à assurer une qualité de vie toujours plus élevée pour ces habitants. Cette stratégie est aussi incarnée par une politique de grands travaux qui se traduit par la création de villes nouvelles telles que NEOM ou Sindalah.
Dans le domaine des relations internationales, l’Arabie Saoudite présente aussi de nouvelles ambitions. Le pays joue un rôle majeur dans la résolution de crise au Moyen-Orient, comme en témoigne la récente initiative portée conjointement par la France et l’Arabie Saoudite, pour la Palestine. Riyad est une escale incontournable pour la diplomatie au Moyen-Orient. Le pays réussit aussi à maintenir une politique d’équilibre entre les Etats-Unis et la Chine, et confirme son statut de puissance internationale
Le pays s’ouvre. Si autrefois, le tourisme était limité aux activités liées au Hadj ou pèlerinage vers La Mecque, l’Arabie Saoudite ambitionne d’attirer une nouvelle catégorie de visiteurs en développant de nouvelles destinations de qualité avec l’organisation d’évènements sportifs ou culturels de dimensions internationale et avec la mise en avant de sites patrimoniaux comme Al’Ula.
Les arts, un pilier majeur de la diversification de l’Arabie Saoudite
L’Arabie Saoudite mise beaucoup sur son patrimoine pour assurer son développement et diversifier de son économie. La culture est un élément important de cette stratégie, et plusieurs musées exposant les richesses et traditions saoudiennes, devraient prochainement ouvrir leurs portes dont le musée de l’or noir à Riyad et celui de la route de l’encens à Al’Ula.
L’acquisition du chef d’œuvre de Léonard de Vinci, Salvator Mundi en 2017 pour 450,3 millions de dollars par le Prince héritier a traduit les nouvelles ambitions de l’Arabie Saoudite sur la scène culturelle. Depuis, l’Arabie Saoudite s’est construit une légitimité dans le domaine culturel et attire les principaux acteurs étrangers du secteur comme en témoigne le succès de la Conférence sur les Investissements Culturels. L’Arabie Saoudite se veut un carrefour entre les différentes civilisations comme en témoigne le futur Musée des Cultures du Monde en construction à Riyad.
La Conférence sur les Investissements Culturels et ses premiers résultats
Lors de cet évènement, plusieurs initiatives artistiques ont été annoncées. Ainsi, le Prince Badr ben Abdullah ben Farhan, ministre de la culture saoudien a annoncé l’ouverture en 2026 d’une université des arts à Riyad qui devrait former à l’horizon 2040 jusqu’à 30 000 étudiants dans la musique, le théâtre et le cinéma. Les nouvelles ambitions artistiques de l’Arabie Saoudite devraient permettre à la fois de diversifier son économie en développant de nouveaux secteurs, mais aussi créer de nouvelles opportunités pour les jeunes Saoudiens (moins de 35 ans) qui représentent aujourd’hui près de 70% de la population nationale. Un des objectifs de l’Université des Arts de Riyad sera de redéfinir le cinéma arabe et de renforcer ainsi son soft power culturel dans la région et au-delà.
Le développement du secteur culturel en Arabie Saoudite attire tous les regards et les plusieurs pays cherchent à accroître leur coopération artistique avec Riyad. La France a répondu positivement au projet saoudien, et a ainsi été inauguré, en présence des ministres français des affaires étrangères Jean-Noël Barrot et de la Culture Rachida Dati, la villa Hegra, résidence artistique franco-saoudienne du désert d’Al-Ula. La décision d’ouvrir cette résidence artistique avait été prise au plus haut niveau entre le Prince Mohammed ben Salmane et le Président Emmanuel Macron en 2018. La villa Hegra rejoindra ainsi le réseau des établissement artistiques français à l’étranger auprès de la Ville Médicis à Rome ou la Villa Kujoyama à Kyoto. Il s’agit pour Paris de renforcer sa présence culturelle en Arabie Saoudite et créer ainsi de nouveaux ponts avec les artistes locaux.
Mais c’est surtout du côté des acteurs privés que l’on voit un fort intérêt pour les ambitions artistiques et culturelles de l’Arabie Saoudite. 89 partenariats ont été annoncés lors de cette conférence représentant des investissements d’un montant total de 1,135 milliards d’euros. Plusieurs fonds d’investissements étrangers ont ainsi annoncé vouloir travailler avec les autorités culturelles saoudiennes pour financer de nouveaux projets culturels notamment dans les secteurs du cinéma, de la mode ou encore les musées. Du côté saoudien, le fond pour film saoudien qui a profité de la tenue de cette conférence pour annoncer son nouveau nom « Riviera Content » développe de nouveaux partenariats avec des studios hollywoodiens pour mettre en avant la destination saoudienne dans les blockbusters à l’audience internationale.
Les géants des technologies et médias comme Google voient aussi dans les efforts menés par l’Arabie Saoudite de promouvoir son patrimoine de nouvelles opportunités pour mettre en avant des solutions basées sur l’intelligence artificielle à visée culturelle.
Plusieurs galeristes comme Colnaghi prévoient de développer leurs activités dans le royaume. Encouragés par le gouvernement saoudien, ces entreprises voient dans l’évolution de la société saoudienne une opportunité pour vendre de nouveaux produits et services culturels, et cherchent à accompagner la nouvelle génération d’artistes saoudiens vers la maturité. Le marché culturel saoudien connait un essor majeur, et l’ensemble des acteurs du secteur espèrent pouvoir y être associé.
L’Arabie Saoudite, devrait sans nul doute devenir une puissance culturelle majeure dans les prochaines années.
Sebastien GOULARD
Sébastien Goulard est consultant chez Cooperans, cabinet de conseil spécialisé en relations internationales.
Il est également le fondateur de Diplomarty.
Sébastien Goulard est titulaire d’un doctorat en études de développement régional de l’École des hautes études en sciences sociales de Paris. Il a participé à plusieurs programmes de recherche européens axés sur l’urbanisation durable en Chine.




